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Sénégal : la perception de la polygamie en milieu urbain

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La polygamie est une situation matrimoniale dans laquelle une personne peut légitimement avoir plusieurs conjoints. Dans certains pays musulmans sa pratique est permise aux hommes.  

Ainsi au Sénégal la polygamie est définie comme le mariage d’un homme avec plusieurs épouses : c’est un mariage coutumier et ou religieux. L’homme doit fidélité à ses épouses de la même façon que ses épouses lui doivent fidélité. Longtemps pratiquée dans nos sociétés ancestrales, notamment dans les familles musulmanes, la polygamie demeure l’un des régimes matrimoniaux en vigueur au Sénégal.

Dans cette dernière décennie, la polygamie s’est répandue à une vitesse exponentielle surtout dans les milieux urbains.  Un constat qui nous pousse à nous interroger sur les raisons de cette expansion. Est-ce par effet de mode, pour la religion ou pour des questions pratiques que certains hommes s’adonnent à la polygamie ? Et pourquoi les femmes acceptent la polygamie ?

Près d’un quart des femmes ayant un diplôme universitaire acceptent de devenir deuxième, troisième ou quatrième épouse, d’après le recensement démographique paru en 2013. Une tendance qui va à l’encontre d’une idée reçue : la polygamie n’est plus réservée qu’aux milieux populaires, ruraux ou analphabète.

Au Sénégal le dernier Recensement Général de la Population et de l’Habitat datant du 1er janvier 2020, montre que sur les 16,7 millions d’habitants dénombrés par la population, qu’il y’a 3,8 millions de polygames dans la seule région de Dakar qui est sa capitale. Les résultats de l’étude de l’ANDS ont montré que 35,2% des personnes mariées vivent en union polygame. Cette pratique est constatée chez de nombreuses femmes qui ont un niveau intellectuel élevé.

En effet c’est la région de Louga qui compte le plus grand nombre de mariages polygames avec un taux de 40,7%. Ainsi la polygamie s’est largement répandue dans le milieu urbain, les hommes ne se limitent plus à deux épouses mais ils vont jusqu’à trois, voire quatre épouses.  « On est passé d’une génération de femmes instruites dans les années 1960-1970 farouchement opposée à la polygamie à une génération qui l’assume, voire la revendique », explique Fatou Sow Sarr, maître de conférences à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Les femmes acceptent la polygamie malgré les souffrances qu’elle peut engendrer 

A ce niveau, il est important de préciser que les femmes acceptent d’évoluer dans un ménage polygame pour diverses raisons. Première, deuxième, troisième, quatrième position, peu importe, pour certaines femmes, car l’entrée dans une union polygamique correspond le plus souvent, pour chacune d’entre elles, à une urgence sociale. C’est le mariage qui donne, selon beaucoup de femmes, un « statut social enviable ». Elles craignent la solitude et le regard peu tolérant de la société à l’égard des femmes encore célibataires, passé un certain âge (la trentaine).

 « Faute de travail, certains jeunes hommes instruits n’ont plus les moyens de fonder une famille. Les femmes de leur classe d’âge ayant fait de longues études épousent donc des hommes beaucoup plus âgés mais avec une bonne situation matérielle et, très souvent, mariés.

La pression sociale autour du mariage contraint les femmes à choisir la polygamie par dépit très souvent », explique Fatou Sow Sarr, qui observe cette tendance parmi ses étudiantes en thèse.

La pression sociale vis-à-vis du mariage est telle que certaines femmes non mariées sont prêtes à entrer dans une union polygame, et à se conforter, malgré elles, dans cette institution.

La liaison entre le milieu urbain et la polygamie n’est pas aussi « négative » qu’on l’a supposé. Il n’est pas étonnant que la polygamie se maintienne à Dakar, puisque c’est un environnement dans lequel cette institution est confortée. Elle bénéficie d’une « légitimité » officielle, religieuse et sociale ; elle jouit d’une normalité qui en banalise l’existence.

Comment est perçue la polygamie en milieu rural et en milieu urbain ?

La polygamie se veut une manifestation de prestige, de jouissance et de puissance sexuelle de la part du « mâle » (le chef de famille) qui la contrôle. Mais elle a été aussi tout au long de sa très longue histoire (Bien avant l’avènement de l’Islam) un outil politique, car pendant longtemps, certains hommes ont opté pour la polygamie afin d’avoir une descendance nombreuse qui constituait une main d’œuvre à bon marché.

Aujourd’hui deux conditions sont nécessaires à l’existence de la polygamie : un important écart d’âge au mariage entre les hommes et les femmes et une structure par âge marquée par une base large due à une fécondité élevée.

Le remariage rapide et fréquent des femmes divorcées ou veuves favorise également cette pratique.
La polygamie permet de s’allier à plusieurs groupes et confère un avantage socio-politique. Elle représente aussi un apport économique, car la femme, par son travail, contribue à l’entretien du ménage.
Le partage des tâches domestiques entre les coépouses est parfois recherché par certaines femmes, surtout en milieu rural, la première épouse allant jusqu’à proposer une seconde épouse à son mari.

Une descendance nombreuse permet d’avoir une main-d’œuvre plus importante et d’espérer une prise en charge par ses enfants durant la vieillesse, tant pour les hommes que les femmes.

Dans des sociétés où le mariage est une priorité, la polygamie constitue une possibilité supplémentaire de ne pas rester célibataire en épousant un homme déjà marié, car la concurrence entre les femmes est accentuée par leur surnombre relatif.

Au Sénégal, en milieu urbain, la mobilité matrimoniale est très importante, divorce et remariage allant de pair avec la polygamie (Dial, 2014). En effet, le célibat est encore mal vécu. Il est même traumatisant pour beaucoup de femmes. Le mariage demeure donc la seule alternative pour elles, à cause de la religion, des pressions familiales, sociales et des avantages matériels attribués à cette union.

Lorsque le célibat se prolonge, il est vécu avec angoisse, amenant même certaines femmes à ne plus être trop regardantes sur leurs prétentions matrimoniales et les remettent carrément à la baisse c’est ce qui occasionne certains mariages polygames.

Les hommes quant à eux s’abritent derrière des justifications religieuses, en évoquant le verset du Coran qui légitime la pratique.

Je suis sénégalaise, mariée, passionnée de discussion de couple, de conseils matrimoniaux, de bien-être, et de tout ce qui a trait à la vie de couple en général. Je suis titulaire d’une Licence en Sociologie et un Master en Communication. Je partagerai avec vous mon expérience sur le mariage au Sénégal et en Afrique; on parlera des dernières tendances, de la dot, de la cérémonie, des cadeaux, de la déco, de la polygamie, de la séduction qui est naturelle chez les femmes africaines, des bonnes manières que les conjoints doivent avoir pour la réussite du mariage et tant d’autres sujets…

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