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Reportage: Niger, Covid-19, quelles mesures pour protéger les femmes?

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Les femmes sont-elles protégées dans les marchés ?

Niamey, à l’entrée ouest du grand marché de la ville, une foule épaisse constituée d’hommes et de femmes, les uns viennent, d’autres partent, mais tous s’affairent.
Dans un coin encombré à côté du mur du marché, quelques charretiers occupés à préparer leurs marchandises de la journée.

A côté des charretiers on constate la présence d’un dispositif de lavage des mains.
Autant de brouhaha, et pourtant la ville de Niamey fait face à une crise sanitaire due à la pandémie de la covid-19. Une Situation qui a poussé les autorités du pays à adopter des mesures afin de protéger les populations contre cette maladie.

Apparue à Wuhan en chine, des précédents documents émanant des autorités sanitaires chinoises ainsi que de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), expliquent que les premiers symptômes du premier cas datent du 8 décembre 2019. Et que la plupart des cas étaient liés au marché des fruits de mer de Wuhan.
Ensuite le 11 mars 2020, l’OMS déclarait dans un communiqué que la Covid-19 peut désormais être qualifiée de pandémie tendant à toucher plusieurs pays à la fois.

Au Niger le premier patient de la covid-19 a été déclaré par les autorité sanitaire le jeudi 19 Mars 2020, « Il s’agit d’un sujet de nationalité nigérienne de 36 ans, magasinier d’une compagnie de transport terrestre ayant voyagé suivant l’itinéraire de Lomé (Togo), Accra (Ghana), Abidjan (coté d’Ivoire) et Ouagadougou (Burkina Faso) » avait déclaré le ministre de la santé M. Illiassou Mainassara dans un communiqué à la télévision nationale.

Des mesures pour tous sans distinction de sexe.

Dès la détection du premier cas, l’État du Niger pour protéger les populations et empêcher la propagation du virus a adopté plusieurs mesures préventives. Ces mesures ont concerné tant les marchés de la capitale que certaines grandes artères de la ville de Niamey.  Les autorités ont appelé avec insistance à leurs applications strictes dans les services publics et privés, les marchés, les restaurants, les entreprises, et les sociétés.

Parmi ces mesures nous avons en première ligne, l’installation de plusieurs dispositifs de lavage des mains au niveau des différentes entrées des marchés de la capitale. Ceci pour permettre à ceux qui viennent au marché de laver leurs mains ; un des gestes barrières pour se prémunir contre la Covid-19 ; avant et après avoir finis son marché.
Une initiative salutaire mais pas sans risque, car ceux qui viennent dans les marchés utilisent leurs mains (peut-être déjà infectées) pour manier la même pompe sans la nettoyer nous explique Alimatou Djibo, 46 ans, habitante du quartier aéroport situé dans l’arrondissement communal Niamey 4, venue acheter des articles pour enfants au grand marché de Niamey « pour moi ce dispositif ne protège pas assez, et on risque même de se faire contaminer. »

Dispositif lavage de main grand marché

En plus de l’installation des dispositifs de lavage des mains, les autorités ont rendu obligatoire le port des bavettes ou de tout autre gadget pouvant protéger le nez et la bouche (turban, hijab, foulards…) et cela au niveau de tous les transports urbains, dans les marchés, les super-marchés, commerces, places publiques de la capitale ; en plus de la distanciation sociale comme indiqué dans le communiqué de la ville de Niamey du 09 avril 2020. La mesure permet surtout de réduire au strict minimum les contacts physiques au niveau des marchés et empêcher que des personnes infectées contaminent d’autres.

Une mesure que Mamadou Zakou, 33 ans vendeur de produits cosmétiques au petit marché de Niamey et dont 90% de ces clients sont des femmes, respecte à la lettre. Chez lui il n’y a pas de négociation possible concernant le respect des mesures préventives, «je veille personnellement à ce que toute personne avant de rentrer dans ma boutique porte son masque, et à l’intérieur le respect de la distanciation reste aussi obligatoire » dit-il avec un ton autoritaire.

Cependant, contrairement à Mamoudou Zakou, certains pour une raison ou une autre n’arrivent pas à faire appliquer ces mesures.
« Je ne peux pas exiger de mes clientes de porter des masques » nous dit Rakia Djibo 53 ans, vendeuse de légumes frais au marché dolé de Niamey. Pour elle, la raison est toute simple et elle a un nom : la concurrence.
En effet, du fait de la concurrence qui fait rage entre les vendeuses, elle n’entend point durcir les conditions d’accès à son stand. Les autres ne le faisant pas, son commerce risquerait d’en-pâtir avec la conséquence de voir ces moyens de subsistance réduit. Et comme pour se donner bonne conscience, elle s’empresse d’ajouter : « je porte mon masque de fabrication local que je prends le temps de laver à chaque fois que je rentre à la maison ».

Toujours dans le but de riposter contre la propagation de la covid19 dans les marchés, la désinfection systématique des paniers, charriots d’achat d’articles après chaque utilisation dans les supermarchés et commerces divers ainsi que les places publiques de la ville de Niamey a été rendu obligatoire, dans un communiqué publié par les autorités de la ville de Niamey en date du 9 avril 2020.

Une autre mesure qui s’applique à tous sans distinction de sexe et qui permet aux populations d’éviter la propagation du virus en touchant des surfaces ou objets infectés. Cependant il faut relever que l’application de cette mesure reste difficile pour certains commerçants.
C’est le cas de Mme Karimou Kadidjatou, 39 ans vendeuse d’articles pour femmes au grand marché de Niamey, « c’est difficile de désinfecter nos paniers après chaque achat ». Une situation qui s’explique surtout du fait que selon elle certaines clientes sont impatientes et préfèrent prendre des risques plutôt que de se désinfecter à chaque fois.

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Manque de mesures spécifiques pour protéger au mieux les femmes.

Il faut préciser qu’il n’y a pas de mesures spécifiques pour protéger les femmes contre le covid-19 dans les marchés. Toutes les mesures qui ont été prises par les autorités s’appliquent à tous les habitants de la ville de Niamey sans distinction de sexe; poursuivant le même objectif,  empêcher la propagation du virus.

De ce fait, l’absence de mesure de protection spécifique contre la covid-19 pour les femmes crée dans un premier temps un sentiment d’insécurité chez ces dernières, « malgré toutes ces mesures je ne me sens pas assez protégée contre le virus » nous explique Khadîdja Kailou, 26 ans, habitante du quartier Harobanda de l’arrondissement communal Niamey 5, rencontrée au marché dolé de Niamey.

Pourtant les femmes sont en première ligne au niveau des marchés de Niamey, car elles viennent généralement pour approvisionner les ménages soit en vivres ou en habillement. D’où l’importance de développer et de mettre en place des mesures préventives s’appliquant spécifiquement à elles.

Ceci est d’autant plus nécessaire parce que la plupart du temps, une fois qu’elles quittent le marché, elles rentrent directement à la maison, où se trouvent les enfants et les autres membres de la famille.  
C’est pourquoi certaines ont adoptées des astuces qu’elles appliquent une fois de retour du marché afin de réduire le risque ; « J’évite de rentrer directement en contact avec l’entourage une fois de retour du marché parce qu’il faut d’abord que je me désinfecte » nous confie Khadîdja ; car si elle est contaminée elle risque de contaminer la famille en retour.

Une situation qui ne laisse pas indifférente certaines défenseuses des droits des femmes. C’est le cas de Zeynab Moussa, coordonnatrice d’une ONG de défense des droits des femmes. Pour elle la protection des femmes contre la covid-19 est d’une importance capitale parce qu’elles fréquentent beaucoup les marchés et sont donc très exposées au virus. « Dans les marchés de Niamey les femmes sont plus nombreuses que les hommes, mettre en place des mesures qui s’appliquent spécifiquement à elles est donc nécessaires » nous dit-elle.

Toutefois, notons que depuis le début de la pandémie de la covid-19 au Niger , les chiffres fournis par le ministère de la santé publique montrent que le nombre de femmes infectées par le virus est inférieur à celui des hommes.

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Journaliste/communicante. Féministe/Activiste pour les droits des femmes et des jeunes filles. Je m’intéresse aux questions de genre et changement climatique. J’aime voyager à travers le monde. Je suis fascinée par la culture et la littérature africaine.

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