La dépigmentation volontaire, un phénomène à la mode mais dangereux

La pratique de la dépigmentation volontaire est devenue monnaie courante, les femmes cherchant à obtenir une peau claire ou, du moins, un « joli teint », comme elles le décrivent. À Niamey, la capitale, cette pratique est répandue parmi de nombreuses femmes et jeunes filles.

Même celles qui ont naturellement une peau claire succombent à la dépigmentation volontaire, persuadées que cela les rendra encore plus belles. C’est le cas de Fati, une enseignante de 29 ans (afin de préserver l’anonymat des témoignages, les prénoms ont été changés). Elle a entamé le processus il y a quelques années : « Même si je suis née avec une peau claire, je ne trouvais pas mon teint assez lumineux, et je constatais des imperfections par endroits. C’est pourquoi j’ai commencé à utiliser des produits éclaircissants. Au début, je me sentais plus belle en les utilisant, mais au fil du temps, ma peau est devenue pâle. Tous mes proches me demandent d’arrêter, moi-même, je veux mettre fin à cette pratique. »

Les médias ne valorisent pas la femme noire

L’image de la femme à la peau claire est souvent considérée comme l’incarnation même de la beauté féminine aux yeux de nombreuses personnes. Les médias jouent un rôle majeur dans la propagation de ce cliché à travers la publicité et d’autres images promotionnelles auxquelles les femmes sont exposées quotidiennement. En plus de l’influence des médias, les femmes s’influencent mutuellement, se livrant à une certaine compétition en matière de teint lors d’événements et se partageant des astuces beauté.

Khadidja, âgée de 30 ans et mariée, aspire à avoir une peau plus claire, car toutes ses amies ont cette caractéristique. Récemment, l’une d’entre elles lui a parlé d’un lait éclaircissant à base de papaye qui promet un teint jaune, « similaire à celui des hindous ». Khadidja est déterminée à essayer ce produit, convaincue qu’une femme à la peau claire attire davantage l’attention. Depuis qu’elle a commencé à éclaircir sa peau, elle se sent plus belle, et elle a remarqué un changement positif dans les regards portés sur elle.

Hawa, âgée de 28 ans, a commencé à se dépigmenter à l’âge de 23 ans. En prévision de son mariage, elle se souvient avoir eu une poussée d’acné pour laquelle elle a cherché des solutions, essayant « toutes les solutions possibles ». C’est alors qu’une amie lui a recommandé une crème éclaircissante qui a « résolu son problème, mais seulement temporairement ». Malheureusement, ces produits ont entraîné d’autres problèmes plus graves, la laissant avec des taches, des cernes autour des yeux et des boutons sur tout le visage. Ces complications l’ont incitée à arrêter complètement l’utilisation de ces produits.

Les jeunes mariées sont aussi influencées

Il est bien connu à Niamey que les nouvelles mariées sont fortement influencées à la veille de leur mariage pour éclaircir leur peau. Leur entourage leur fait remarquer qu’elles seront encore plus belles si elles optent pour un éclaircissement, ne serait-ce qu’un peu. Face à cette pression, beaucoup cèdent à la tentation. Ainsi, des mélanges souvent étonnants, préparés par des « chimistes » experts, leur sont proposés pour obtenir un éclaircissement rapide. Cela se fait généralement au grand étonnement des époux, qui ne sont pas toujours d’accord avec cette pratique.

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La dépigmentation a des effets négatifs sur la santé

Cependant, la plupart des femmes qui commencent à s’éclaircir ignorent les effets secondaires engendrés par l’utilisation de ces produits éclaircissants. Même les crèmes dites haut de gamme contiennent parfois des ingrédients toxiques tels que l’hydroquinone, la cortisone ou le mercure.

Les dermatologues sont unanimes : la dépigmentation volontaire est un danger pour la peau et la santé. En réalité, les femmes qui s’éclaircissent sont en train de compromettre la santé de leur peau sans s’en rendre compte.

Ces produits peuvent causer de multiples problèmes cutanés tels que des poussées d’acné, l’apparition de poils sur le visage, la fragilisation de la peau, l’apparition de vergetures et d’imperfections sur certaines parties du corps, des infections cutanées, des odeurs désagréables, pour n’en citer que quelques-uns. Mais surtout, les produits éclaircissants peuvent entraîner des problèmes de santé plus graves, tels que le diabète, l’hypertension artérielle, l’obésité, l’infertilité, etc.

Les pays prennent des mesures

Dans certains pays africains tels que la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kenya, la RDC, la Tanzanie et l’Ouganda, la commercialisation des produits éclaircissants est strictement interdite. Ces mesures ont été prises par les autorités pour préserver la santé de leurs populations. Au Rwanda, les autorités ont récemment non seulement interdit la commercialisation de ces produits mais aussi leur utilisation.

Dans plusieurs pays d’Afrique, comme le Sénégal, où la commercialisation de ces produits est encore permise, des associations se mobilisent pour lutter contre la dépigmentation volontaire, qui devient un véritable problème de santé publique.

De plus en plus de voix qui s’ élèvent contre la pratique

Sur internet, des voix influentes s’élèvent également pour attirer l’attention des utilisatrices sur les dangers de la dépigmentation, à l’exemple de « La Therma, à vos visages à vos corps », une YouTubeuse camerounaise influente et pharmacienne de formation. Elle a choisi de combattre vigoureusement la dépigmentation volontaire chez les femmes noires. Consciente des risques liés à l’utilisation des produits éclaircissants, elle sensibilise les femmes noires sur la question et leur propose des solutions plus saines pour résoudre leurs problèmes, que ce soit d’hyperpigmentation ou d’acné.